hicham-berhil
les règles de la dramaturgie classique
Le 11/02/2011
Un petit rappel de ce que nous avons vu en classe.La théâtre est soumis à une série de règles, la bienséance, la vraisemblance, et les trois unités (unités de temps, de lieu, et d'action).
La bienséance (adjectif bienséant)
- ce qu'il est permis de montrer sur la scène sans choquer le public de l'époque. Elle est donc variable d'une époque à une autre et d'une culture à une autre. On ne montre sur la scène ni la violence, ni la mort sanglante ni le contact physique. La bienséance rend le théâtre tragique un théâtre surtout de paroles.
La vraisemblance (adjectif vraisemblable)
-ce qui semble croyable dans l'attente du public. La vraisemblance est conditionnée par l'époque et par le genre. Elle est affaire de préparation psychologique de la part de l'auteur et doit se distinguer de la vérité. En termes très simples, la vérité présente ce qui est, la vraisemblance ce qui devrait être.
Les trois unités
Les trois unités s'appliquent également à la tragédie et à la comédie.
- Unité d'action (appelée aussi unité de péril) : la pièce ne met en scène qu'une seule action principale. Il peut y avoir des intrigues secondaires mais ces dernières doivent trouver leur résolution au plus tard en même temps que l'action principale.
- Unité de temps: (appelée aussi unité de jour ou la règle des 24 heures) - toute l'action représentée est censée avoir lieu dans un seul jour.
- Unité de lieu : toute l'action représentée se déroule dans un seul endroit. On ne peut pas montrer un champ de bataille et ensuite l'intérieur d'un palais. Pour la tragédie, on choisit le plus souvent une salle commune à l'intérieur d'un palais mais Corneille croyait qu'on pouvait représenter différentes salles dans un même palais. La comédie préfère une salle dans une maison bourgeoise ou un carrefour public. L'unité de lieu exige des récits de ce qui se passe ailleurs, les récits de combats notamment (où la question de la bienséance joue aussi).
On peut aussi ajouter une dernière règle,celle de la grandeur : les personnages sont des rois , des reines, des princes...
le récit du messager
Le 30/01/2011
LE MESSAGER __ Une terrible nouvelle. On venait de jeter Antigone dans son trou. On n'avait pas encore fini de rouler les derniers blocs de pierre lorsque Créon et tous ceux qui l'entourent entendent des plaintes qui sortent soudain du tombeau. Chacun se tait et écoute, car ce n'est pas la voix d'Antigone. C'est une plainte nouvelle qui sort des profondeurs du trou... Tous regardent Créon, et lui, qui a deviné le premier, lui qui sait déjà avant tous les autres, hurle soudain comme un fou : «Enlevez les pierres ! Enlevez les pierres ! »Les esclaves se jettent sur les blocs entassés et, parmi eux, le roi suant, dont les mains saignent. Les pierres bougent enfin et le plus mince se glisse dans l'ouverture. Antigone est au fond de la tombe pendue aux fils de sa ceinture, des fils bleus, des fils verts, des fils rouges qui lui font comme un collier d'enfant, et Hémon à genoux qui la tient dans ses bras et gémit, le visage enfoui dans sa robe. On bouge un bloc encore et Créon peut enfin descendre. On voit ses cheveux blancs dans l'ombre, au fond du trou. Il essaie de relever Hémon, il le supplie. Hémon ne l'entend pas. Puis soudain il se dresse, les yeux noirs, et il n'a jamais tant ressemblé au petit garçon d'autrefois, il regarde son père sans rien dire, une minute, et, tout à coup, il lui crache au visage, et tire son épée. Créon a bondi hors de portée. Alors Hémon le regarde avec ses yeux d'enfant, lourds de mépris, et Créon ne peut pas éviter ce regard comme la lame. Hémon regarde ce vieil homme tremblant à l'autre bout de la caverne, et, sans rien dire, il se plonge l'épée dans le ventre et il s'étend contre Antigone, l'embrassant dans une immense flaque rouge. (PP.118-119)
les quatre espaces dans la pièce
Le 04/02/2011
Bien que le lieu soit unique conformément à la règle classique (voir la règle des trois unités), on peut dire qu’il y a quatre espaces dans notre pièce. Passer d’un espace à un autre c’est s’approcher d’une mort certaine et inévitable.
Il y a tout d’abord l’espace non-tragique de la tragédie, à savoir la chambre. C’est le lieu de la vie domestique et de l’intimité : « Je me lève quand il fait noir encore, je vais à ta chambre pour voir… »(P.14),"Je viens de ta chambre.", « Alors, écoute: tu vas rentrer chez toi »(P.65), « tu vas rentrer chez toi tout de suite »(P.69), « je vais remonter dans ma chambre »(P.90), « Et puis elle (=Eurydice)est passée dans sa chambre, sa chambre à l’odeur de lavande, aux petits napperons brodés et aux cadres de peluches »(P.120)
Cette chambre est contigüe au lieu tragique qui est l’antichambre. C’est la scène proprement dite ; c’est l’espace du langage et donc du débat entre les protagonistes. C’est ici où Créon condamne sa nièce et l’envoie aux cavernes de Hadès : « L’antichambre est pleine de monde. »(P.96)
Le troisième espace est la pièce. C’est une sorte de salle d’attente où la condamnée attend, avec le garde qui la surveille, ses bourreaux chargés de la faire mourir.
Le dernier espace est l’extérieur. Du palais à l’extérieur, il n’y a aucune transition ;ils sont collés l’un à l’autre. Cette contiguïté est exprimée ici par les fenêtres : « Si tu parles, si tu fais un seul pas vers moi, je (=Antigone)me jette par cette fenêtre. »(P.44), « Pourtant, je (= Créon) ne vais même pas fermer ma fenêtre. »(P.77), « Le cadavre de ton frère qui pourrit sous mes fenêtres. »(P.80). L’extérieur est l’espace de la mort. En effet, la mort physique (celle de Polynice, d’Antigone, de Hémon, d’Eurydice) n’appartient pas à l’espace tragique ( c'est-à-dire l’antichambre et donc la scène du théâtre).Quitter la scène, c’est, pour les personnages, mourir : les « Gardes, emmenez-la »(P.99) et « il est sorti comme un fou. »(P.105) sont déjà des arrêts de mort.